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Il neige sur le Lac Majeur
Il neige sur le Lac Majeur
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22 juin 2007

17- Du 2 au 28 mai

02 - 28 mai 2007

Quatre semaines de rencontres



Page écrite le 29 mai à bord du Canada Senator en attendant le départ.

Je ne m'étends pas sur la vie de famille, sur le temps partagé avec Jean et Béatrice, sur mes tête-à-tête avec Jeanne, ni sur l'explosion du printemps à Montréal, avec des variations de température allant de 4 ou 5° à plus de 30°. A propos de tête et de Jeanne, quand même, cette anecdote datant du jour du départ, alors que j'allais pour la dernière fois la conduire au jardin d'enfants. Je venais de lui poser une question, je ne sais plus laquelle, dont je ne connaissais pas la réponse. Et elle, l'index sur le crâne : “ Réfléchis dans ta tête ! ” Et pas encore deux ans et demi !... Comment voulez-vous ne pas être papy gâteux ?
Pendant ces quatre semaines, vraiment perçues comme une longue escale, j'ai continué à vivre encore en grande partie dans le monde des bateaux à travers des rencontres multiples, inopinées ou provoquées.

ENTRE ANCIENS COMPAGNONS DE VOYAGE

Comme prévu au moment où nous avons débarqué, mes quatre compagnons de traversée sont venus dîner chez Jean et Béatrice le vendredi soir. Oui, les quatre : Laurence avait finalement réussi à mettre pied à terre, mais seulement en fin de journée le mercredi, libéré par un agent de l'immigration s'excusant de son retard. Nous avons mis en commun toutes nos photos et commencé à graver un DVD. Coïncidence ? Nous avions été trois à éprouver de légers vertiges environ 36 h après avoir débarqué. Le mal de terre ?
Depuis cette soirée, j'ai déjeuné une fois avec Rona qui avait déjà commencé son stage pour le festival Trans-Amériques. Elle a visiblement été séduite par Montréal et envisage d'y prolonger son séjour. Jean, Béatrice et moi avons reçu une gentille carte de Lucy, très heureuse de sa virée à Halifax. Stefan a pédalé assez vite jusqu'à Toronto où il a retrouvé de la famille éloignée puis a pris la direction des Etats-Unis en passant par l'île de Manitoulin, dans le lac Huron. Pour lui les rencontres intéressantes se succédaient. Aux dernières nouvelles, par téléphone, il arrivait à Sault-Sainte-Marie pour entrer aux Etats-Unis le 26 mai. Quant à Laurence, il m'a annoncé le 28 par courriel qu'il avait trouvé un job de cuisinier dans un restaurant végétarien de Montréal. Exactement ce qu'il recherchait. Comme quoi, la philo et la socio mènent à tout.
Le lendemain de mon arrivée à Montréal j'ai reçu un courriel de Jean-Pierre Aucher, avec qui j'étais en 4ème (mais pas dans la même classe) et que je n'ai jamais revu depuis plus de 40 ans. Il avait eu vent de mon voyage et me donnait les coordonnées de sa fille Céline, journaliste à La Charente libre, arrivée en juin 2006 à bord de l'Eilbek, sister-ship du Flottbek, et toujours présente à Montréal où son frère s'est installé. Je me suis évidemment précipité sur le blogue de Céline, et sur l'autre où elle raconte son aller-retour en voiture Montréal-Vancouver (presque comme Geneviève et moi en 1992 avec Jacques et Jo-Anne). Puis nous avons partagé nos expériences dans un petit restau marocain du marché Jean Talon.

LES SHIPSPOTTERS ENTRENT EN SCÈNE

Quelques jours après l'arrivée, je suis allé consulter le site de shipspotting pour voir si, par hasard, il n'y avait rien de nouveau sur le Flottbek. Bingo ! Marc Boucher, alias Speedo, était en embuscade au bon moment, le 1er mai, ce qui nous valait un magnifique cliché du Flottbek au pied du Château Frontenac. Double bingo ! Un peu plus loin, à l'embouchure de la rivière Chaudière, au passage des ponts, Steve Geronazzo était lui aussi en poste et avait saisi notre navire au moment où il rattrapait le MSC Sicily. (Voir photos dans l'album du Saint-Laurent)
Par chance, Steve donnait son adresse courriel sur le site. Je me suis empressé de prendre contact avec lui et nous avons entamé un abondant échange de messages. Grâce à lui j'ai pu joindre Marc Boucher et entrer aussi en relation avec Jacques Trempe, autre shipspotter. J'ai découvert ainsi ce réseau de passionnés qui savent tout sur les bateaux. J'ai communiqué à Steve toutes mes photos d'autres navires prises à partir du Flottbek, dont une, par exemple, d'un bateau au nom inconnu (de moi) pris à Liverpool. Dans les deux heures j'avais le nom et les caractéristiques du bateau en question !
Steve a fait passer certaines de mes photos sur le site, en indiquant l'adresse de mon blogue. Conséquence : alors que j'avais seulement communiqué cette adresse à mes “ commanditaires ” et quelques rares autres personnes, le blogue avait déjà été consulté, quand j'ai quitté Montréal, par 250 visiteurs différents d'Australie, du Brésil, de Russie et de très nombreux autres pays ! Autre conséquence : les shipspotters ont été mis en alerte par Steve pour guetter le Canada Senator. Le 27 mai, Marc Boucher a saisi son passage devant le Château Frontenac. Jacques Trempe (mais je ne sais pas où exactement) a pris plusieurs clichés dont un de l'arrière du bateau où l'on voit parfaitement les deux hublots de ma cabine. La descente du fleuve était attendue, elle aussi, dans l'espoir qu'elle se ferait de jour pour permettre des rendez-vous. Pour faciliter l'identification, j'ai annoncé que je porterais une casquette rouge et, si possible, un autre signe facilement reconnaissable dont je réservais la surprise. Il s'agissait d'un drapeau du Québec que j'ai acheté dans une boutique de la rue Saint-Hubert et qui m'a valu d'assister à une petite scène bien amusante (voir plus bas).

LE CAP-CHARLES PAR LA TERRE :
DELPHIS ET MONIQUE DUHAMEL


Le plus important était celui que j'espérais avoir avec Delphis et Monique Duhamel au Cap-Charles. Ce sont eux les “ marotteux ”, comme ils se définissent eux-mêmes, qui saluent les bateaux de passage. Une fois à Montréal, j'ai cherché à joindre par courrier postal le pilote Pierre Marchand (“ près de l'église de Gentilly ”, c'est tout ce dont je disposais comme adresse, et j'ai utilisé le code postal de ladite église) pour le remercier encore et lui demander les coordonnées de “ l'homme aux hymnes ”. Ma lettre est-elle restée en souffrance ? En tout cas je n'ai pas reçu de réponse. C'est alors qu'est intervenu Steve. Il n'avait pas entendu parler du Cap-Charles mais, grâce à un autre shipspotter il m'a vite fait parvenir les renseignements souhaités.
J'ai donc écrit (vivent les courriels !) à Delphis et Monique Duhamel pour leur dire mon désir de les remercier de vive voix. Leur invitation est arrivée par retour dans les minutes suivantes. Jean ayant laissé la voiture à ma disposition, j'ai donc fait la route le 24 mai par un temps estival qui avait mis dehors des cohortes de Harley (rive nord à l'aller jusqu'à Trois-Rivières, rive sud au retour). A mon arrivée, pourtant imprévue car ils m'avaient mal compris et m'avaient attendu la veille, j'ai eu droit au lever des couleurs et à une nouvelle Marseillaise chantée par Mireille Matthieu.
Arrivé vers 11 h, j'ai passé au Cap-Charles quatre heures merveilleuses avec deux personnes rayonnantes qui ne vivent que pour faire partager leur amour du fleuve et des bateaux. Delphis surtout est intarissable (au point qu'il n'est pas toujours facile de placer vos questions) mais Monique est toujours prête à ajouter un détail, rattraper un oubli. J'ai partagé avec elle des instants d'intense émotion dans la salle d'exposition quand nous avons évoqué les sentiments de tous les émigrants qui remontaient le fleuve et ceux des jeunes soldats canadiens qui le descendaient pour venir combattre chez nous (oh ! tous ces noms de gamins de 20 ans sur les croix du cimetière canadien de Courseulles-sur-Mer, un soir lumineux de juillet)...
Dans cette salle d'exposition qui rassemble des objets donnés aux Duhamel, on ne peut rater, en entrant, trois uniformes complets et authentiques de la marine nationale française : un uniforme d'été, un d'hiver et un de travail. En 1967, pour l'exposition universelle, le navire de guerre Colbert est venu à Montréal accompagné de trois navires d'escorte. A la descente, les trois escorteurs sont passés successivement devant le Cap-Charles sans qu'aucun ne réponde au salut des Duhamel. Ceux-ci, on s'en doute, étaient fort dépités, à tel point qu'ils ont failli rentrer chez eux sans attendre le Colbert. Un ami les a retenus et quand le navire est arrivé, quelle surprise et quelle émotion ! Tout l'équipage, en uniforme blanc, était aligné le long du bastingage. La sirène du bateau a retenti et tous les marins ont lancé en l'air leur bonnet à pompon !... Quelques années après, un ancien du Colbert (mais qui n'était pas à bord ce jour-là) leur a offert de grandes photos du navire et de ses escorteurs ainsi que les trois uniformes.
Thalassa, de G. Pernoud, a consacré une séquence à Delphis et Monique, auxquels se sont intéressés aussi un certain nombre de journalistes. Ils reçoivent l'été beaucoup de visiteurs (2000 en 2006) et je gage que ceux-ci ne repartent pas déçus, même s'ils n'ont pas comme moi la chance de partager les spaghetti bolognaise de Delphis et la tarte aux pommes à la crème glacée et au sirop d'érable nouveau de Monique. La bouteille de Corbières apportée était bien peu de chose au regard du plaisir éprouvé.
Chaque matin, les Duhamel dressent la liste des bateaux annoncés pour la journée. Sur son ordinateur, Delphis dispose du logiciel professionnel qui permet de localiser tous les bateaux entre le Labrador et New-York. Dans la maison et à l'extérieur, des haut-parleurs diffusent en direct les informations données sur la fréquence des pilotes. Les caractéristiques de n'importe quel navire du monde sont disponibles en permanence (tonnage, année de construction, noms successifs, nationalités des marins, puissance du moteur, etc., etc.), en particulier dans les grands registres des Llyods.
Pendant que je me trouvais au Cap-Charles sont passés un pousseur canadien descendant et un cargo hollandais montant. Tous deux ont eu droit aux pavillons (la tâche de Monique) et à la diffusion des hymnes (Delphis aux commandes). Tous deux ont été enregistrés dans les répertoires toujours tenus à jour. Pendant que résonnait l'hymne hollandais, j'observais avec la puissante longue-vue les deux hommes sortis de la timonerie du cargo, immobiles sur l'aile bâbord. La coque du bateau nous renvoyait le son des puissants haut-parleurs. J'en avais la chair de poule.
Pour plus d'informations sur le Cap-Charles, l'adresse du site : http://www.cap-charles.ca/

UNE RENCONTRE INATTENDUE,
UNE RATÉE, UNE ESQUISSÉE


En rentrant tout doucement vers Montréal par la route qui longe le fleuve d'assez près côté sud, j'ai retrouvé le cargo hollandais en face de Trois-Rivières. J'en ai pris plusieurs photos que j'ai ensuite envoyées à Steve. Je me suis arrêté à Verchères, à Varennes, pour repérer les lieux où opèrent les shipspotters, dont Marc Piché. Entre Verchères et Varennes, j'ai croisé une nouvelle fois l'Algoport, comme le 1er mai. Retournait-il encore chercher du sel aux îles de la Madeleine ? Photos encore, malgré une lumière médiocre.
J'allais oublier une autre halte, malheureusement décevante. A Gentilly j'ai essayé de trouver M. Marchand en cherchant autour de l'église, mais en vain. Les personnes interrogées (dont, sans doute, le curé, mais là je n'ai pas été trop surpris !) ne le connaissaient pas. Je n'ai pas osé aller au cabinet médical où travaille sa conjointe, et ma seconde bouteille de Corbières est revenue à Montréal.
Le même soir, j'ai trouvé un commentaire sur la dernière page de mon blogue. Il émanait d'une dame qui devait embarquer le lendemain sur le Flottbek avec son mari. Encore trop inexpérimenté dans l'administration du blogue, je n'ai découvert que deux jours plus tard – après le départ du Flottbek – que je pouvais accéder à l'adresse courriel d'Alison Hobbs et à l'adresse de son propre blogue : http://www.alisonh.wordpress.com/. Sur celui-ci, elle annonçait juste son départ en précisant que, pour revenir à Montréal, le Flottbek avait rencontré une violente tempête avec des vents de force 11 ! Je ne sais si je dois être satisfait d'avoir échappé à des conditions assez extrêmes ou regretter une expérience inoubliable. Je penche plutôt pour la satisfaction mais peut-être qu'avec le Canada Senator... (Coïncidence : Alison Hobbs vient de finir aujourd'hui même, comme moi, de mettre en ligne son récit de traversée. Une traversée beaucoup plus agitée que la nôtre ! A lire...)

Petite histoire de drapeau

Dans la boutique où j'attendais mon tour, deux messieurs d'environ 80 ans, devant moi, s'intéressaient aussi aux drapeaux. Selon toute apparence, des “ provinciaux ” en visite dans la grande ville. L'un d'eux avait déjà choisi un petit drapeau de Montréal mais il trouvait trop petit celui du Québec de la même taille et trop grand le seul autre modèle (qui me convenait, à moi, parfaitement). A côté du grand drapeau à la fleur de lys en étaient présentés trois autres à la feuille d'érable, de tailles différentes. “ Trop petit, trop grand... ” Les hésitations n'en finissaient pas à propos des deux seuls modèles du drapeau québécois. Finalement son compagnon dit au monsieur : “ Puisque c'est cette taille que tu veux, prends donc ce drapeau du Canada. ” Et l'autre, sincèrement indigné : “ Ah ben non ! On est bien au Québec, icitte, on n'est pas au Canada ! ” Quel dommage que je ne puisse pas restituer l'accent et le ton !

A suivre...

Ici se termine la première partie de mon récit. Le voyage retour sur le Canada Senator sera raconté dans un autre blog associé, à paraître prochainement, intitulé Vers Pénélope.
A bientôt.

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